Bilan et perspectives de l’économie régionale

Entretien avec Alain DEBIASI,
Directeur Régional Champagne-Ardenne de la Banque de France

refletsactuels.fr/wp-content/uploads/2012/01/DEBIASI-1-510_cr1-373x146.jpg 373w" sizes="(max-width: 510px) 100vw, 510px" />Bilan globale de l’année 2011 ?
Une année très contrastée.  Un bon démarrage, en région, en France et dans le Monde qui a fait dire que nous étions en sortie de crise. Et puis s’est amplifié le problème de la Grèce.  Vers Mai et Juin 2011, la crise de la dette souveraine a occupé le devant de la scène. Elle marque aujourd’hui encore les esprits et c’est de cette crise qu’il est question, pas  d’une crise de l’euro en tant que monnaie.
Il faut admettre la dimension affective de cette situation : la Grèce est dans l’Union Européenne et la construction de l’Union Européenne n’est pas terminée. La question centrale est simple : est-ce qu’un État peut faire défaut ? Et si certains pensent que la réponse est « oui » -ce n’est pas le cas de la Banque Centrale Européenne ni de la Banque de France-, que se passe-t-il pour lui et ses partenaires ? Ne pas oublier, dans ce contexte, l’imbrication forte entre les finances des États et celles des banques.
Une crise de la dette souveraine ?
Par contrecoup, l’économie est à la merci de ce que font les États et les banques. Très clairement en Europe, nous sommes dans une crise de la dette souveraine. Pour autant, il est faux de dire que l’économie n’a plus accès au crédit. A fin octobre 2011, le taux d’augmentation du total des encours, en France, est encore de l’ordre de + 4 %, et même de + 5,6 % pour les encours effectivement mobilisés.
Si vous considérez  l’opinion selon laquelle, a contrario, les banques sont devenues plus réticentes vis-à-vis des collectivités territoriales, il faut examiner dans quel contexte. Les collectivités territoriales appartiennent à la sphère publique. Il s’agit de financements à long terme. Les banques font, à ce niveau, un métier spécifique avec des risques spécifiques.
Il est vrai qu’on assiste à un certain « trou d’air » sur les collectivités locales. Et c’est là que, confronté à cette situation nouvelle, notamment après la disparition de Dexia, le Gouvernement a engagé la création d’un nouvel outil capable de dépasser l’appréhension de certaines banques sur ce marché précis.
Crise financière ou crise économique ?
L’économie mondiale progresse toujours. Le PIB des pays dits émergents progresse de 4 à 10% si l’on prend les cas du Brésil et de la Chine. Celui des pays avancés (60% de l’économie mondiale) progresse entre un peu moins de 1 et + 3 %. L’Allemagne (3e puissance mondiale), la France (5e) et le Royaume-Uni (6e) sont en ralentissement, pas  en récession. Donc, nous sommes bien plus, aujourd’hui, dans une crise financière que dans une crise économique.
Et pourtant, on peut parler d’un problème de l’Union Européenne : un marché unique, une monnaie unique et une gouvernance qui ne l’est pas. On est loin de la règle : un État, un budget, une monnaie.
Et la Champagne-Ardenne dans cette crise ?
Notre région n’est pas dans un îlot préservé. Son économie dépend de l’économie nationale et mondiale. Deux spécificités connues : le secteur agricole et agro-alimentaire, toujours performant  et l’importance relative de l’industrie portée par la tradition, en Haute-Marne et dans les Ardennes, de la métallurgie.
L’industrie est une chance réelle pour la région. A fin Octobre, on peut constater dans l’industrie régionale, une extraordinaire variabilité de la demande. C’est une nouveauté, avec une majorité des commandes à horizon de court terme. Le jugement sur les carnets de commandes n’est pas mauvais et les chiffres d’affaires des entreprises devraient être en progression globale à fin 2011, l’activité du premier semestre ayant assuré l’essentiel de cette progression attendue.
Si  la situation financière des entreprises régionales reste encore marquée par la crise de 2008-2009, la capacité de résistance de l’ensemble du tissu économique est remarquable. Certes, les interventions de l’État (garanties OSEO, les reports de dette fiscale, les mesures de chômage partiel, la politique de grands travaux … ont favorisé cette résistance.  Et, lorsque l’on parle de la progression de la dette publique (63% du PIB en 2007, portés à 85% aujourd’hui), il faut la rapporter à ce soutien à l’économie.
Portrait de l’entreprise résistante ?
Quel secteur ou quelle taille d’entreprise pour une meilleure résistance à la crise ? Ni l’un ni l’autre. On peut, en revanche, affirmer que les entreprises tournées vers la grande exportation (vers les pays tiers) et celles qui sont innovantes, mai s également celles qui possèdent une structure financière flexible (fonds propres) ont beaucoup plus de chances de s’en sortir que d’autres. La martingale, c’est, pour l’instant, le Champagne, parce qu’il est fait ici et nulle part ailleurs.
La révolution agro-industrielle est un pari certain pour l’avenir champardennais. Patience ! Et, j’ajoute ceci : le secteur des services bouge bien en région. Regardez, par exemple, ce qui se fait autour de Reims. Regardez les potentiels d’avenir dans le triangle Reims, Epernay, Châlons-en-Champagne. Cette zone est attractive et mérite beaucoup d’intérêt. Et ce n’est pas la seule.
L’incertitude est le risque majeur du monde que nous vivons. La volatilité est la règle, avec des carnets de commandes à deux ou trois semaines. C’est cela la mondialisation. Mais nous n’avons pas le droit d’occulter des progrès que nous faisons, avec cette autre règle qui commence à s’imposer : des comportements plus coopératifs qu’individualistes.
Des vœux pour l’économie régionale ?
Bonne et longue vie ! Je fais confiance aux chefs d’entreprise régionaux. Ils connaissent leurs marchés et ils gèrent bien. S’ils parlent l’anglais et s’ils sortent de leur territoire, alors le Monde leur est encore beaucoup plus ouvert.

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