Bernard Poret: un entrepreneur au chevet de la Cathédrale de Reims

Dehors, à moins de cinquante mètres de là, le jour de notre entretien, au soleil, comme attardé dans un fond d’air devenu plus frais, l’été indien cède la place au printemps de la grande rose de Notre- Dame de Reims, enfin dépouillée de son échafaudage, en ce début de Novembre.

Professeur agrégé de mathématiques, c’est à Saint-Jean-Baptiste de La Salle qu’il exerce son métier durant vingt-trois ans, avant de prendre la direction de l’établissement, entre 1987 et 2007. S’il publie une vingtaine de livres de mathématiques au cours de cette période, Bernard Poret laisse, derrière ses quarante-trois années au service de l’éducation, l’image d’un bâtisseur aussi inspiré qu’infatigable.

L’aménageur de Saint-Jean-Baptiste de La Salle

Il est ainsi le créateur, au sein de son lycée, d’espaces de formations aussi nécessaires qu’innovantes  : un centre de formation continue pour les salariés des entreprises, tourné vers les techniques de l’automatisme et réalisation pionnière en Champagne-Ardenne, un centre de formation pour les apprentis métallurgistes, désormais indépendant du lycée, et un département, outil unique dans l’enseignement privé en France, consacré aux métiers de l’audiovisuel, sans oublier la création de l’internat du lycée.

Cette section audiovisuelle qualifiante et diplômante, ouverte en 1991 et couvrant les niveaux Bac+3, BTS et Licence professionnelle, bénéficie depuis 1994 d’un centre répondant à la formation de tous les métiers de l’audiovisuel, au voisinage d’une radio locale (Radio Jeunes Reims), la première en France au sein d’un établissement d’enseignement, également créée par Bernard Poret et qui fonctionne depuis 1988. « J’ai beaucoup construit à Saint-Jean-Baptiste de La Salle, aux alentours de cent millions de francs en vingt ans ».

Il faut rajouter à cette soif d’entreprendre la candidature en 2008 de « Cœur de Champagne », association qu’il a présidée, pour la création d’une télévision locale à Reims émettant sur la Marne et les Ardennes. Candidature non retenu et projet vite rangé dans un tiroir sans fond, comme le furent par la suite bien d’autres. Un regret ?  « C’était faisable, commente Bernard Poret, nous aurions pu en surprendre beaucoup ».

Le Président hyper actif des Amis de la Cathédrale

« Plus que mes études, ce sont dix années de scoutisme qui m’ont construit. J’y ai découvert entrepreneuriat et l’amour des tâches et des dossiers importants ». En 2009, la présidence des Amis de la Cathédrale de Reims est  vacante à la suite du décès du Président en exercice. A priori, pas forcément enthousiaste, Bernard Poret jauge le challenge : « Il y a des choses à faire ».

Créer en 1917, l’Association possède un objet unique : participer aux côtés de l’Etat à la restauration de la  Cathédrale, une fois la guerre terminée. Deux dossiers s’imposent à Bernard Poret dès sa prise de fonction : le 800e anniversaire de la Cathédrale et la restauration de la grande rose. Les Amis de la Cathédrale ne sont pas financeurs mais apporteurs de fonds, au nom des mécènes, des donateurs et des actions menées par l’Association, telles que des concerts, des conférences ou des voyages.

C’est ainsi que 30% du coût de la restauration de la grande rose de la Cathédrale, sur un total de 3,3 millions d’euros en majorité financés par l’Etat via la DRAC, la Direction Régionale des Affaires Culturelles, vont permettre le renouveau du portail occidental, le vitrail, la pierre et la statuaire. Les travaux, commencés en Octobre 2013, ont pris exactement trois années.

L’Association comptait 350 adhérents en 2009. Les Amis de la Cathédrale sont aujourd’hui au nombre de 700, faisant de cette structure culturelle et patrimoniale la plus importante de la Champagne-Ardenne. Que des bénévoles et donc pas de salaires. Un euro récolté égale un euro investi. Un profil des adhérents ? « Je souhaite, insiste Bernard Poret, ouvrir l’Association à tous les publics. On n’est pas obligé d’être catholique pour aimer la cathédrale ».

Mais, peut-être suffit-il  pour adhérer d’aimer l’histoire, l’art, la sculpture, l’architecture ou d’avoir envie d’être utile à la sauvegarde d’un tel patrimoine ? La grande rose était l’une des dernières parties non restaurées de la façade occidentale, un pan de la Cathédrale en travaux depuis une trentaine d’années et qui va vivre sans échafaudage jusqu’au début de l’année prochaine.

Une restauration sans cesse recommencée

La fin des travaux sur la Cathédrale ? Hélas non, répond Bernard Poret. « Ce ne sera jamais fini, à cause de la pierre friable et des lourdes séquelles de la Guerre de 14-18. Ne serait-ce que les travaux nécessaires à la toiture ou encore ceux à venir concernant le portail central et ses sculptures du XIIIe siècle. Les dommages de guerre n’ont couvert que 30% de ce qu’il aurait fallu faire après 14-18. La richesse architecturale exige cet effort. Imaginez Reims sans sa cathédrale ! Le tourisme à Reims ? Le Champagne, certes, mais la cathédrale avant tout ».

Entre 1611 et aujourd’hui, cette façade occidentale de la Cathédrale a connu sept restaurations. Si dans l’immédiat, les Amis de la Cathédrale de Reims, sont attachés à la restauration complète de ce portail central, un autre chantier se précise : « Quand ? Nous ne le savons pas encore, mais il s’agit là d’un mécénat national, voire international, nous allons engager, le plus vite possible, la restauration de l’orgue. L’étude menée par la DRAC est déjà faite. Les estimations financières, fin du portail central et orgue,  tournent autour de 4 millions d’euros ».

Le cœur de la Cité des Sacres

Petit cours d’histoire pour les nuls, avec l’aide bienveillante de Bernard Poret : les rois sacrés à Reims sont au nombre de 34, dont 3 à la Basilique Saint-Remi. Sur les 31 rois sacrés dans les trois cathédrales, la récente plaque apposée dans Notre-Dame de Reims faisant foi, 25 l’ont été dans l’actuelle Cathédrale et 6 dans les deux édifices antérieurs. Et pour plus de précision : sur ces six premiers, un roi a été sacré dans la première cathédrale et cinq dans la deuxième.

Les 23,24 et 25 Juin prochains, les Amis de la Cathédrale de Reims fêteront leur 100e anniversaire et inaugureront à cette occasion la grande rose restaurée. Avis aux photographes : la façade sera sans aucun échafaudage jusqu’à la fin de l’année. Et dès Janvier, encore deux à trois ans de travaux sur la façade, mais cette fois-ci avec un chantier beaucoup plus discret.

« J’ai été le premier client Macintosh® à Reims ». Petite fierté du mathématicien et écrivain Bernard Poret, cet entrepreneur précurseur devenu amoureux du passé dont la bonne connaissance est, faut-il le préciser, la meilleure façon de comprendre comment aborder l’avenir.

 

 

 

 

 

 

 

 

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