Des racines espagnoles, un goût avéré pour les sciences, Carmen Munoz Dormoy dirige en région les équipes d’ErDF et milite pour la place de la femme dans le management
refletsactuels.fr/wp-content/uploads/2014/01/JDE-Ardennes510_cr-373x146.jpg 373w" sizes="(max-width: 510px) 100vw, 510px" />Carmen Munoz-Dormoy
Où sont vos racines ? Un paysage, des parents, une enfance ?
Je suis née en Espagne et j’ai quitté mon pays à l’âge de vingt ans. Je suis venue en France finir mes études d’ingénieur. Lorsque l’on me demande d’où je viens, je me sens surtout européenne, très européenne. Les racines sont aussi là où l’on vit, là où l’on apprend. Je me sens très bien, ici, en Champagne-Ardenne.
Mon père était mécanicien dans l’armée de l’air et ma mère institutrice. Je viens de la classe moyenne. Mes parents m’ont inculquée le sens du devoir, de l’effort et l’importance de l’école. Le goût des sciences et de la technique me vient d’eux. Mon père a aussi été responsable de la centrale électrique qui alimentait sa base aérienne en énergie.
Comment devient-on ingénieur ?
Durant toute mon enfance je pensais être un jour architecte. J’ai choisi l’école d’ingénieurs industriels parce que, du point de vue des déplacements, c’était plus pratique pour moi. Mais j’ai aussi réussi à intégrer une option bâtiment.
Au bout de trois années d’études, je me suis retrouvée major de ma promotion et on m’a proposée l’Ecole Centrale de Paris pour poursuivre mes études. J’ai appris la langue française en trois mois. Peut-être par goût de l’aventure et surtout parce que je n’avais pas le choix. J’ai donc un double diplôme d’ingénieur.
J’aurais pu faire carrière en Espagne, notamment chez Procter & Gamble à Barcelone. J’avais un copain français, ingénieur comme moi. Nous nous sommes mariés, nous avons deux enfants et tout va bien ainsi. Donc, je suis restée en France.
Bouygues, 5 ans, EDF, 11 ans et ERDF depuis 5 ans, et pratiquement toujours et très vite à des postes de manager et de direction ? Faut-il être la meilleure et faut-il diriger pour être heureuse ?
Non, on est heureux là où l’on apporte quelque chose à quelqu’un. Si je dirige et si j’aime diriger c’et parce que j’aime le travail d’équipe. Je suis heureuse quand je réussis avec des équipes. La direction d’équipes est venue très naturellement. Mais le bonheur appartient à chacun et les bonheurs sont multiples. Moi, j’adore diriger, c’est ainsi. La notion de réussite parce qu’on dirige est très réductrice quand on parle du bonheur.
Le bleu de travail et un casque ? Cette image que signifie-t-elle ?
J’ai un grand respect pour mes équipes et pour le terrain dans lequel elles évoluent. Mon père, dans ses avions ou son usine travaillait en bleu et les mains dans le cambouis. Je dois donner l’exemple en matière d’équipement et de sécurité. Je suis très à l’aise quand j’enfile ma tenue de chantier. Je suis fière de mon métier.
Votre militantisme dans le cadre de l’Association « Elles bougent », vos déclarations sur l’atout d’être une femme dans le management d’entreprise, on pourrait vous étiqueter « féministe », est-ce vraiment cela ou quelque chose de plus ?
C’est vrai que les femmes son pragmatiques et qu’elles doivent jongler dans un monde peut-être plus exigeant pour elles. Etre à la fois mère et professionnelle leur donne le sens du pragmatisme. Je ne suis pas une militante du féminisme. Quand on m’a demandée de créer la branche Champagne-Ardenne de l’Association « Elles bougent », j’ai endossé une mission capitale : ne pas laisser les jeunes filles bridées dans des métiers forcément féminins.
Ma fille veut faire un métier d’ingénieur. C’est son choix. Et pourtant, dans son collège, en matière d’une orientation possible, on lui a fait découvrir le métier de technicienne de laboratoire. Vous trouvez cela normal ? On subit une aberration culturelle : les hommes sont dynamiques, plein de leadership et les femmes pleines de tendresse, d’écoute et d’empathie. Bonjour les clichés !
Que l’on laisse les filles choisir leur carrière et que les garçons puissent en faire autant, voilà mon militantisme. J’appelle cela de l’humanisme : écouter les jeunes et les aider dans leurs choix, même si ces choix déplaisent à certains.
Le sport prend une place particulière dans votre vie. Peut-on évoquer l’aïkido ou les 10 kms de Reims à toutes jambes et peut-être d’autres exploits encore ?
Je viens d’obtenir ma ceinture noire d’aïkido (armes et combats à mains nues), après cinq ans de travail acharné dans cette discipline exigeante. J’ai ainsi appris à me servir de la force des autres pour les neutraliser. Les 10 kms de Reims ? Une catastrophe enthousiasmante !
Mais j’ai gagné dix minutes entre la course de 2012 et celle de 2013. Je referai cette course en 2014. Je participe aux côtés de mes 200 équipiers d’ERDF. Je me motive grâce à eux. Le sport ? Il faut bouger, c’est une question de santé.
Vous dessiniez des plans sur vos cahiers d’écolière, vous avez dessiné des costumes de scène pour votre fille, pouvez-vous nous dessiner un petit coin de la vie dont vous rêvez pour vous et pour les autres ?
Des gens qui se tiennent la main. Le collectif. Etre tous ensemble. Se sentir utile et s’aider. Faire des choses ensemble. Cette photo des 200 agents d’ERDF au départ des 10 kms de Reims, voilà un petit coin de bonheur. Le bonheur ne peut pas être solitaire.
Vos vœux pour 2014 ?
Que les Champardennais mesurent bien tous les atouts de leur région. Je suis triste de constater que des champardennais vont s’installer ailleurs. Cette région mérite qu’on l’aime. Nous avons des voies de communication extraordinaires, un climat beaucoup moins difficile que dans bien d’autres régions françaises et surtout des conditions d’hébergement moins onéreuses qu’ailleurs. Que les Champardennais mesurent tout cela et le fassent savoir !
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